Ceci est une suite de l'article: http://gestionereputation.over-blog.com/comment-d%C3%A9marre-une-crise-2.0 ( si vous ne comprenez pas les soleils feuilles etc. , c'est expliqué là-bas et cette typologie provient d'Emmanuel Bloch )
Reprenons donc le schéma de la propagation de la crise. Nous avons donc un événement qui survient et qui est repris par un soleil parce que cet événement provoque en lui une indignation ou suscite une critique qu’il a envie de faire partager. Le centroïde et les intermédiaires captent ces informations du soleil et font passer les informations aux feuilles.
Le bruit produit par ce processus qui se passe sur les réseaux sociaux parvient aux blogs des « spécialistes » suivis par la presse en ligne, puis par la radio et enfin par la télévision.
Quelles sont les différentes motivations des acteurs de cette propagation?
1. Réseaux sociaux
- Les soleils et les intermédiaires: ils ressentent une indignation ou estiment que l’entreprise a fait une erreur et souhaite le lui signaler. (la critique)
- Les centroïdes : les centroïdes propagent les informations pour renforcer leur statut de centroïdes. Ils ont vu la crise et veulent être les premiers à l’annoncer à leurs contacts. Ils peuvent aussi partager le sentiment d’indignation ou le sentiment que l’entreprise a fait une erreur.
- Les feuilles: leurs motivations peuvent être multiples. Cela peut simplement être une distraction (le côté ludique de faire plier une entreprise grâce à la puissance du Web tout en faisant passer le temps), le renforcement d’appartenance à un groupe (défendre les valeurs qui structurent le groupe et prouver sa conformité à celui-ci) ou les mêmes motivations qu’un soleil ou un intermédiaire.
A noter que les premiers propagateurs de crise sont les community manager d'autres marques !
2. Blog d’ « expert »
Les crises sont un moyen optimal pour les « experts » digitaux qui peuplent Internet de prouver leur expertise et d’entretenir leur influence.
Ils décryptent, analysent et donnent les bons ou mauvais points aux entreprises. Il est d’ailleurs très intéressant de remarquer que la plupart du temps, si la crise reste archivée en bonne place sur Google, c’est du fait des articles provenant de ces blogs d’« experts ».
Ils ne s’impliquent pas dans la crise, car ils se doivent de rester rationnels, mais leur décryptage fera la trace visible de la crise après que celle-ci a été réglée. Ils peuvent, par contre, se servir de leur influence pour créer une crise (v. cas Orangina) et devenir ainsi plus que simple spectateur.
3. Presse en ligne, radio et TV
L’information est leur motivation essentielle. Les « Buzz » sont en outre des informations que ces médias apprécient, dans la mesure où leur transmission ne requiert que peu de travail d’investigation et qu’elle répond à un demande du public, curieux des derniers potins. La Dernière Heure propose même un blog dédié aux buzz. (http://alorsonbuzz.blogs.dhnet.be)
Le cas particulier : la rumeur
Le mot rumeur vient du latin « rumor » qui dans son sens premier veut dire « Bruit qui circule, propos, nouvelle, on-dit ».[1] Celles-ci ont pris un essor particulier avec l’arrivée d’Internet qui a facilité leur propagation. La principale raison de la stimulation qu’elle procure est qu’elle explique des zones floues ou confidentielles. Michel-Louis Rouquette établit 4 composantes essentielles des rumeurs : [2]
- L’implication : les relais des rumeurs sont concernés par les rumeurs qu’ils transmettent. Les rumeurs font donc partie de l’environnement social de ceux qui les transmettent.
- L’attribution : la rumeur n’est que le compte-rendu d’un autre compte-rendu d’un événement. De ce fait, la rumeur n’est pas vérifiable sur le moment où elle est énoncée. Il y aurait, selon Rouquette, deux types d’attribution : « l’attribution anonyme ou quasi anonyme » (l’ami d’un ami m’a dit que) et « l’attribution à une personne ou un groupe dont la compétence est, en principe reconnue, par les partenaires de l’échange ».
- La négativité : les rumeurs sont rarement positives.
- L’instabilité : les messages véhiculés par la rumeur sont, par définition, instables. Le message sera déformé par oubli, ajout ou restructuration. C’est pour Rouquette la preuve que la rumeur est un produit, le résultat d’un processus de production.
Selon Ronan Boussicaud, pour faciliter la propagation du message, l’information doit être réduite à sa plus simple expression et être accentuée sur ses traits principaux.
La rumeur ne naît pas rumeur, elle le devient. Elle peut être facilitée par le climat social.
Selon Ronan Boussicaud, nous avons un changement actuel : alors que les rumeurs adoptaient auparavant le profil d’une courbe de Gauss, nous aurions désormais « un maintien crescendo de ces croyances infondées, jusqu’à l’arrivée du point de rupture ». (Soit une preuve de la supercherie, soit une lassitude par rapport à l’information) [3]
Autre problème que Ronan Boussicaud expose : le fait que les médias traditionnels considèrent désormais les médias sociaux comme une source d’information à part entière.
Ils s’en servent comme d’une source de premier choix pour leurs articles.
Dans l’imaginaire collectif, les médias traditionnels possèdent toujours une fonction de référence.et d’authenticité alors qu’ils prennent de moins en moins le temps de vérifier les sources de leurs informations. Dernier problème exposé : le fait que l’ironie, l’humour ou le sarcasme soient difficilement perceptibles sur Internet. Dès lors, cela peut fausser l’interprétation du message et transformer un message ironique en une information sérieuse.
Pour les entreprises, il y a donc deux solutions pour vaincre la rumeur : l’exposer grandement et rapidement ou attendre que l’internaute se lasse. Il faut en tout cas impérativement exposer rapidement la rumeur avant qu’elle ne prenne de l’ampleur et soit perçue comme authentique. Un bon exemple, dans ce domaine-là, a été l’initiative de Barack Obama durant les élections présidentielles de 2008, qui a lancé un site « Fight the smears » où toutes les rumeurs concernant Obama étaient reprises et démenties clairement et le plus rapidement possible.
Est-ce que vous, vous avez vu une autre façon qu'a la crise de se propager? Si oui, laquelle?
[1] "Rumor." Def. 1. Félix Gaffiot
latin français. ed. 1934
[2] Rouquette, Michel-Louis. Le syndrome de la rumeur. 1990. 119-123. Print.