Véritable Buzzword il y a de cela 3 ans, l’e-réputation est aujourd’hui devenu un mot qui a de plus en plus une connotation négative. En réalité, l’e-réputation a connu un pic quand il fallait expliquer ce que c’était. Maintenant que tous les blogs ont fourni leur propre définition, non sans déposer quelques phrases de publicité pour leur agence, d’aucuns voudraient lui sacrifier son « e » comme une petite peau superflue qu’il se faut d’enlever pour parler entre gens biens. Il est donc plus que temps de réaliser une grande enquête sur l’e-réputation en dépassant le spectre de la simple définition pour voir l’usage qui est fait ce mot. Qui sont les personnes ou organisations qui utilisent ce mot ? Avec quels autres mots s’associe-t-il ? Quelles communautés tournent autour ? Réponse dans cette enquête réalisée grâce au logiciel SaaS Visibrain.
I. Méthodologie
Une analyse de contenu sur Twitter en utilisant le logiciel Visibrain et en recueillant sur Twitter tous les mots clefs suivants :
- ereputation
- e-reputation
- eréputation
- e-réputation
La période porte sur les tweets entre le 10 mars et le 21 mai 2014. Pour éviter certains biais, nous avons enlevé le hashtag #netsurlenet qui comprenait tous les résultats du test lancé par la ville de Paris.
II. Analyse
1. Rythme de vie

Le nombre total de tweets est de 9482. Pour une période aussi longue, c’est peu. Ainsi, à titre de comparaison, la crise vécue par Intermarché comportait 14 417 tweets en 3 jours. Le nombre d’acteurs est, lui aussi, très restreint puisque seuls 4468 utilisateurs sont recensés. Le nombre de retweet est assez faible tandis que la part de tweets avec des liens est gigantesque. Cela montre que nous avons affaire à des stratégies de contenu.
Le volume de conversation est minime tout comme le nombre d’utilisateurs. L’e-réputation est donc un mot de niche parmi le secteur utilisé la plupart du temps dans des stratégies de contenu ou pour hiérarchiser des articles.
2. Analyse de contenu
Analyse des hashtags utilisés
L’analyse des hashtags permet de voir comment les utilisateurs classifient eux-mêmes le terme d’e-réputation. Cette analyse permet donc de dépasser les typologies faites par des spécialistes ou chercheurs en e-réputation qui analyse de manière holistique le champ de l’e-réputation.

Si l’on reclasse ses hashtags par catégorie, nous pouvons classifier l’utilisation du mot e-réputation par ordre d’importance selon :
- La typologie de son univers : SEO (367), Community management (301+ 60 = 361), veille (165), webmarketing (128), marketing (112), personal branding (94), RH (86), communication (69), ecommerce (48), emarketing (47), smo (46), etourisme (40), RP (31), SMM (29)
- La typologie des médias référents : socialmedia (557), réseaux sociaux (167, 73, 32), Twitter (139), web (106), google (77), internet (70), Facebook (62), press (46), média sociaux (33 , 33), linkedin (31)
- La typologie des événements/publicités: conferep (132), enquête du cac40 par Digimind (55), printemps des entreprises (52), reputationprotect
- La typologie des qualificatifs et autres mots connexes : emploi (95), bad buzz (73), réputation (44+ 29 = 73), recrutement (63), entreprise (60, 58), digital (57), job (56) ,influence (42), startup (41), formation (37), design (35), crise (35), PME (33), tourisme (32), image (31), IUT (29), QR code (27)
Au niveau des champs du marketing, c’est tout d’abord le monde du SEO qui emploie le plus ce terme. Viennent ensuite le community management, la veille et le marketing. Les relations publiques sont loin derrière avec seulement 31 mentions.
Alors que le personal branding vient loin derrière, on remarque la présence des mots emplois, recrutement, formation en bonne place dans les mots connexes ce qui montre le mot est fort associé au monde de l’emploi alors que peu d’univers abordent cet aspect-là par le concept d’e-réputation.
On remarque également que le terme est également repris pour des événements ou des formations (IUT, formation). La présence des mots PME, startup et tourisme (tourisme/tourisme) montre que le concept d’e-réputation concerne essentiellement les petites et moyennes entreprises et particulièrement ceux dans le secteur du tourisme.
Enfin, on remarque que l’on essaie de faire rêver avec des mots comme emploi, influence, et recrutement pour le marché des particuliers ou au contraire, de faire peur avec des mots comme crise et bad buzz pour le marché des entreprises.
Le mot e-réputation est un mot repris essentiellement dans le monde du SEO et du community management à destination des PME et start-up. Il est utilisé à la fois pour les particuliers (emploi, RH) et pour les entreprises. (réputation, e-marketing)
Sa promotion est assurée en faisant miroiter auprès des particuliers un avenir heureux si la e-réputation est au rendez-vous, ou en faisant peur aux entreprises (surtout les PME et le secteur Horeca) en agitant le spectre d’une e-réputation mal gérée qui dégénérerait en bad buzz ou en crise.
Analyse des articles les plus partagés sur Twitter :
- Vie privée : contrôlez-vous votre e-reputation sur le web ? Journal du Geek.
- Baromètre de l e-réputation des entreprises du CAC 40 – Marketing Professionnel e-magazine.
- E-réputation, ne nous trompons pas de combat – Les échos.
- Test e-réputation de la ville de Paris – Ville de Paris.
- E-réputation : quel indicateur prendre en compte – Resoneo
- Un audit de votre e-réputation : clé de voûte de la stratégie | Blueboat : E-réputation
- La e-reputation, pourquoi faire ? – Tamento
- L’e-réputation, corollaire de l’employabilité ? | Le Cercle Les Échos
- La (e) réputation comme nouvelle forme d ? autorité sur le web ? – CaddE-Réputation
- The very important role of e-reputation in the cosmetic marketing in China – Marketing China
Il apparaît très clair que le mot e-réputation renvoie à des articles sponsorisés. Il faut attendre le 9e article le plus partagé pour avoir un article qui ne soit pas écrit par une agence. Soit il s’agit d’article expliquant les bases du domaine écrites par une agence, soit il s’agit d’action de communication comme c’est le cas pour Reputation Squad (1 er et 4e article) ou Digimind. (2e article)
C’est la preuve qu’après des années d’articles au sujet de l’e-réputation, on en est encore à expliquer ses bases, chacun arrivant avec sa propre définition et que le concept n’est repris que par de petites agences.
Tweets les plus partagés sur Twitter :
http://twitter.com/edparentsprofs/status/456761957107122177
Vous aurez remarqué la première place magnifiquement prise par l’agence Tamento. Je vous suggère de regarder les retweets : ils sont tous effectués par leur compte bidon qu’ils gèrent. C’est aussi cela le monde de l’e-réputation : un monde où les charlatans tiennent bonne place. Officiellement, pour raison SEO :
On se rend, par contre compte, que le mot e-réputation est mieux utilisé dans les tweets comme classificateurs d’information autour de l’identité d’une personne sur le Web ou de suivi de campagnes. Il est ainsi utilisé par de multiples publics : organisation, journaliste, curateur, professionnels, agence. Il est aussi beaucoup utilisé à travers des infographies.
3. Analyse des intervenants
Analyse géographique

Confirmation que le monde de l’e-réputation est essentiellement français. Il faut même dire francophone puisque les langues utilisées sont :

Confirmation de ce que certains observateurs comme Tom Liacas dans son article e-réputation : its’s a french thing, à savoir que l’e-réputation est essentiellement francophone et ce même si du côté anglophone, on utilise les notions d’Online Reputation.
Analyse psychodémographique
Au niveau des métiers des intervenants, nous retrouvons :

Essentiellement des acteurs du monde du webmarketing. Majoritairement des agences de communication, des community manager, des experts/consultants et entrepreneurs. Cela confirme le framing observé lors de l’analyse des hashtags utilisés, à savoir que le mot est essentiellement pris par des personnes qui ont un intérêt économique. Il faut attendre la fin du classement pour trouver un autre métier : des avocats certainement spécialisés dans ce domaine.
Analyse des interactions/Producteur de contenu
Les mentions nous informent sur ceux qui produisent du contenu ou échangent des informations autour de la e-réputation. Visibrain permet d’extraire les relations au format Gefx ce qui permet de les traiter avec un logiciel de Graph :

On a donc une idée très précise de par où circule le contenu au sujet de la e-réputation :
- Les agences de e-réputation : Reputation Squad , Blueboat, JG-up, Vanksen, Reputation VIP
- Les curateurs autour de Scoopit : Jérôme Deiss, Aurelie Coudouel , Camille Jourdain.
- Les blogueurs : Nicolas Vanderbiest , Hervé Monier, Camille Alloing
- Les médias qui traitent le sujet grâce à des articles sponsorisés ou anecdotiques : Journal du geek, Le Journal du Net, Le Blog du modérateur, Le Cercle les Échos.
Les plus cités sont :

4. Analyse des communautés.
Pour cette analyse, j’ai repris l’ensemble des intervenants qui ont tweeté avec le mot e-réputation durant la période. J’ai analysé les liens entre eux afin d’en faire la cartographie (ceux qui ont moins de 250 liens entre eux ont vu leur nom être effacé) :
Vous pouvez également voir cette carte en format plus facile ici.
Enfin, vous pouvez rechercher votre pseudo parmi cette cartographie afin de voir les relations dans cet univers grâce au moteur de recherche ici (Google Chrome et un bon pc recommandé pour une vision optimale !)
Nous pouvons constater des communautés homogènes avec très peu de communautés externes. Cela nous montre une fois de plus que l’on a affaire à un microcosme.
Tous ceux en rose pratiquent le mass following et ont donc les mêmes poissons pêchés. Même si certains ont une influence, elle ne peut être confirmée par la cartographie.
En mauve, les communautés RH et en jaune la communauté communicante.
5. Top influenceurs et médias sur l’e-réputation
Cela nous permet donc d’isoler ceux qui font du mass following afin d’établir la liste des influenceurs dans la communauté e-réputation.
Concernant le Top 20, voici les 10 personnes à suivre dans le domaine selon la préférence des gens qui constituent le réseau :
- Camille Jourdain
- Jérôme Deiss
- Fadhila Brahimi
- Camille Alloing
- Marie-Laure Vie
- Patrice Hillaire
- Christophe Asselin
- Olivier Cimelière
- Alexandre Jouanne
- Ronan Boussicaud
J’en suis 8 dans cette liste personnellement. Deux personnes ont le tweet tellement éclectique que j’ai du mal à trouver la valeur ajoutée. A vous de voir donc !
Pour les médias, le Top 5 des sites web suivis par les communautés de l’e-réputation est le suivant :
1. Webmarketing& com

Webmarketing & co’m décrypte l’actualité du marketing on-line et partage avec vous conseils et cas pratiques.
http://www.webmarketing-com.com
2. Le journal du geek

Parle de tout ce qui intéresse les geeks
http://www.journaldugeek.com
3. Le blog du modérateur

De l’actualité, des conseils et des outils pour maîtriser l’évolution des réseaux sociaux, du web, et du recrutement innovant.
http://www.blogdumoderateur.com
4. Influencia Le Mag

INfluencia, »Le trendmag des influences », de la communication, du marketing et des médias.
http://www.influencia.net
5. CaddE-réputation

Blog de Camille Alloing sur la e-réputation.
http://caddereputation.over-blog.com
Conclusions
Le volume de conversation est assez faible ce qui montre que l’e-réputation est un concept de niche. Essentiellement utilisé par le monde du SEO et du community management à destination de PME, il est particulièrement présent dans le secteur du tourisme. (Sans doute à cause de Trip Advisor et autres) Le concept est également repris par certains acteurs dans des marchés connexes. (Synthesio) Il s’agit également d’un concept très francophone, ce qui pose la question de savoir si ce sont les Français qui se trompent ou le monde qui rate quelque chose.
Les différents acteurs de l’e-réputation ont tendance à vendre du rêve pour les personnes (emploi) et de la peur pour les entreprises (bad buzz) dans le but de fournir leurs services.
Malgré le fait que l’e-réputation ait surgi il y a plusieurs années, les articles sur le sujet se cantonnent encore à en expliquer les bases, encore et encore. Pourtant, le terme est employé sur Twitter par de multiples acteurs du Web (journaliste, organisation, professionnel, quidam, etc.) qui semblent avoir bien incorporé cette notion. Seulement, l’ensemble des acteurs qui mentionnent ce mot est composé en une communauté homogène ce qui montre que nous avons affaire à un monde clos où l’e-réputation apparaît comme une évidence alors qu’on en est encore loin en dehors de ces acteurs. Ceux qui en parlent sont très adeptes de plateforme de curation comme Paper.li ou Scoop.it. Enfin, il existe un grand nombre d’acteurs qui pratiquent le mass following, pensant que cela leur conférera une influence certaine. Or, une simple analyse des communautés permet d’identifier clairement les adeptes de cette pratique.
En conclusion, le mot e-réputation est un concept qui est fait pour mourir dans un proche avenir. Utilisé par des agences avec des buts commerciaux, il s’agit plus d’un concept qui est devenu un outil SEO, car il permet d’avoir plus d’opportunité d’être bien placé sur Google que sur des mots comme « Réseaux sociaux », « Webmarketing » ou « SEO ». La faute à des agences et consultants qui ont des pratiques peu scrupuleuses ainsi qu’à l’amalgame qu’ils créent par leurs activités de « nettoyeurs du net ». Pourtant le concept avait une raison d’être afin de se positionner comme une agence qui « écoute le web ». Il a rapidement évolué vers des agences qui cherchent à nettoyer les égouts du web ou de foutre sa semence en bonne place à travers le web. Thierry Wellhoff, président du Syntec RP, rencontré à une conférence à Paris, m’avait expliqué qu’il avait voulu changer le mot relations publiques en relations publics uniquement parce que lorsqu’on laissait publiques, la première chose à laquelle on pensait, c’était, je cite : » quelqu’un avec un verre à la main ». Quand on dit réputation management, on a la notion d’écoute et d’opinion ; quand on dit e-réputation management, on imagine au pire un charlatan avec un balai nettoyant un forum, au mieux, un conducteur de motocrotte roulant à toute vitesse à travers Google Image.
Il reste qu’un seul espoir pour l’e-réputation : que son emploi par les gens en fasse un mot incontournable qui ait du sens de façon à ce que son emploi ne soit pas résumé à un article cheap ou un détournement événementiel.