Après 160 jours, la Belgique a enfin son gouvernement. ( La Suédoise) Celui-ci, même s’il est qualifié de gouvernement de centre droit penche fortement à droite et le Parti socialiste, qui est dans chaque gouvernement depuis plus de 30 ans, se retrouve dans l’opposition.
Ce dernier s’est donc prêté à une campagne de communication mobilisant les réseaux sociaux autour du site injuste.be qui propose une série de vidéo caricaturant toutes les mesures “injustes” du gouvernement. L’occasion d’analyser les conversations sur Twitter pour évaluer si après le Thunderclap qui a tourné au Thunderflop, le terrain des réseaux sociaux est devenu un instrument d’influence.
Analyse
1. Volume de conversation
La période couverte est entre le 17 et le 24 octobre. On remarque que le pic est réellement atteint le 21 octobre. Les tweets qui ont lieu avant la période sont ceux-ci en réalité des biais ou un tweet de la FGTB ( le syndicat socialiste) :
La campagne commence dès 6h59 avec le premier tweet qui provient du responsable de la cellule Web de PS Jette :
https://twitter.com/Le_Febure/status/524455025964101632
Cette vidéo est d’ailleurs la plus tweetée parmi la playlist :
On peut néanmoins qualifier l’initiative de véritable flop sur Twitter, même s’il faut souligner qu’il n’y a pas de bouton “partager sur Twitter” ( ce qui est en soi une preuve d’amateurisme)
2. Sémantique
Comme l’ensemble n’était pas bien piloté sous forme de hashtag, la majorité de ceux-ci sont peu pertinents. ( leasing, michel 1, belgique..)
Les mots les plus tweetés furent aussi “Gouvernement MRNVA, Injuste, et le PS”.
3. Analyse des “conversations”
On le voit dans l’ensemble, cela n’a pas créé le moindre débat ou la moindre conversation. Cela est confirmé par les graphiques : beaucoup d’isolés, et des minis “discussions” qui sont en réalité des retweets.
Les conversations ne vont d’ailleurs pas du tout dans le sens du PS puisque l’on parle plus des “coulisses” :
Pour rappel, le Parti socialiste n’a pas annoncé clairement que c’était une initiative de sa part.
Analyse des acteurs
Les plus mentionnés furent Elio Di Rupo, le PS et Himad Messoudi. ( journaliste à la RTBF)
psofficiel |
eliodirupo |
himad |
rtbfinfo |
bkurstjens |
phwalkowiak |
asolim |
le_bux |
benmathieu |
J’ai également désiré voir les relations entre les différents intervenants, c’est-a-dire les communautés en place :
On remarque :
- Une communauté PS ( avec un biais qui est sudpresseonline, apparemment bien suivi par les membres du PS, mais pas par les autres)
- Une communauté média et autres partis
- Une communauté commentateurs politiques
- Une communauté flamande autour de la NVA
Cela nous montre qu’il y a eu très peu de commentateurs grand public ( surtout des Pro PS et des commentateurs politiques “neutres”)
Conclusions
Un véritable flop
L’initiative est un flop total sur Twitter. Pour autant, Twitter n’est pas le centre du monde et les vidéos n’ont pas été pushées sur ce réseau social. Il faut donc vérifier le succès par d’autres critères que seulement Twitter. Les vidéos étant présentes sur Youtube et Facebook, il faut partir de celles-ci pour établir les benchmarks. La Dernière Heure parle de 600 000 “vues” sur Youtube et Facebook, et d’un véritable succès. Pour autant, si l’on analyse les vidéos sur Youtube, elles ont un succès très modéré. 40 372 vues pour celle-ci qui est dans la moyenne :
La meilleure est celle-ci avec plus de 80 000 vues :
A titre de comparaison, une simple vidéo de la RTBF sur la réanimation culmine dans les mêmes eaux :
Les 600 000 vues me semblent donc d’une part tout à fait irréalistes mais en plus, ils sont un total cumulé de toutes les vidéos. Si comme moi, des gens ont regardé toutes les vidéos, nous sommes comptabilisés plus de 3/4 fois minimum. Quant aux 3 000 partages, cela ne représente que 10 % d’engagement pour une vidéo pushé par des militants et qui ont fait l’objet de campagnes Facebooks ads. Le Flop en terme de KPI est donc conséquent.
Social, le Parti socialiste ?
Aucun lien Twitter, aucun lien Google +. Il serait temps que les partis politiques en Belgique, dans leur ensemble, remarquent qu’il n’y a pas que Facebook et que chaque réseau social possède son propre public. De plus, pour une campagne “social” media, il est assez étonnant de voir ceci :
Même si tous les trolls étaient sans doute de sortie, cela est plutôt de mauvais ton. Surtout que de toute façon, les conversations se déplacent :
La tristesse du débat politique
Le plus grave reste le climat de bataille de recrée que tout cela sème. Nous évoluons vers une communication politique semblable à la France où le débat se résume à “l’autre est le plus nul”. Plus personne ne fait de campagne pour proposer ses idées, mais pour détruire celles des autres. La politique est devenue un sport où il faut choisir sa couleur :
Les partis politiques doivent comprendre qu’ils ne doivent pas être dans le “tout communication”, mais être dans la proposition et dans la construction. Au final, les seuls gagnants de ce genre de campagnes sont les tenants de la formule “tous pourris”. L’autre pseudo enseignement de cette opération est de nous montrer que les partis n’ont toujours rien compris à Facebook ou Twitter. Ils se contentent de faire pusher un message par sa base en mode propagande alors que seule la construction d’un nid propice au dialogue et au débat peut mener à une influence réelle.