Depuis une semaine, les médias regardent un phénomène importé du Canada en se demandant s’il s’agit d’un nouveau phénomène “gilets jaunes”. Par leur regard, ils favorisent, en réalité le phénomène qui ressemble surtout à un rebranding des communautés antivaxs.
Analyse via Brandwatch
Une propagation classique
La propagation commence avec :
1. La couverture canadienne francophone du mouvement qui se déroule à la fois par des médias locaux, mais aussi avec quelques politiques.
2. Les mouvements antivaxs et proche de Philippot (Trump France, BLF.TV) identifient le mouvement et se prennent à espérer une contagion en France. Russia Today en fait notamment un article.
3. Le mouvement se structure sur Facebook via groupes et prend de l’ampleur passant de 40 000 personnes dans le groupe Facebook le 28/01 à 360 000 le 11 février. (Facebook annoncera avoir supprimé des comptes ““En France, comme dans d’autres pays, nous avons supprimé des groupes, des comptes personnels et des pages concernant ces mouvements de protestation pour avoir enfreint plusieurs des règles de nos plateformes, notamment pour avoir spammé et trompé des gens pour monétiser leur intérêt pour ce mouvement””
4. Les médias répercutent “le buzz” via les chaînes d’information en continu. (BFM, Cnews)
5. Les autres groupes d’opposition rejoignent le mouvement
6. Des médias généralistes en parlent désormais
7. Les politiques d’opposition s’approprient le mouvement
Gilets jaunes et convoi de la liberté : même combat ?
Rapidement, un parallèle est fait avec les gilets jaunes. Le parallèle est un peu difficile dans la mesure où la propagation n’est pas exactement la même.
Le convoi de la liberté circule d’un point de vue conversationnel depuis un certain moment à cause du Canada. Par ailleurs, nous n’avons pas accès aux données de Facebook pour avoir des statistiques de différence.
Seul Twitter, en analysant l’essor des conversations via des courbes de volumétries :
On remarque que les convois de la liberté ont eu une base de départ plus solide, mais a mis plus longtemps à émerger.
De plus, les pics des week-ends ne sont pas atteints de la même manière. On peut cependant trouver des similitudes de départ :
Une émergence sur Facebook assez rapidement. Les groupes sur Facebook ont créé de nouvelles formes de mobilisation qu’on observait pas avant les gilets jaunes. Cependant, depuis, les réseaux de contestation sont maintenant bien formés sous forme de communautés. Il est très facile pour quelqu’un qui a eu des logiques de contestation par le passé (Gilets jaunes, bonnets rouges, Nuit debout, etc.) d’avoir noué des liens avec des personnes autour de ces mobilisation. Ce réseau est à nouveau remobilisable autour de nouvelles causes.
Un mouvement sans revendication claire de façon à laisser un maximum de personnes rentrer dans le mouvement et brasser large. Cela fait que pour des formes de contestation comme les gilets jaunes, on peut observer des gens d’extrême gauche et d’extrême droite rentrer autour de narratifs communs, le rejet d’Emmanuel Macron et du pouvoir étant le principal.
Via les mots-clés déployés, on voit que c’est surtout la question des vaccins (pass vaccinal, vaccins, qui suscitent des questionnements.
Ensuite, la réaction de l’état avec plus de 7000 forces de l’ordre ont également amené des conversations autour des mots “blindés”, chars, ou Lallemant.
Enfin, les gilets jaunes sont évoqués que cela soit sur le hashtag ou sur des questionnements spécifiques.
La question est dès lors :
S’agit-il d’un mouvement gilets jaunes ou d’une prolongation des anti-pass ?
En analysant les auteurs sur les conversations autour des convois de la liberté, et ceux qui utilisent les hashtags antipass (#passdelahonte OR #nonaupassdelahonte OR #pfizergate), on remarque des audiences extrêmement similaires qui diffère globalement uniquement des médias qui sont mobilisés.
Audience commune entre les personnes ayant tweeté sur le convoi de la liberté et les hashtags antipass
Conclusion
On peut donc facilement dire que numériquement les audiences antipass et ceux du convoi de la liberté sont pareils.
Est-ce le cas aussi pour ceux dans la vie réelle ?
L’un n’empêche pas l’autre, mais ce qui est certain, c’est que le rebranding de la manifestation permet un narratif plus axé sur le concept de liberté et d’opposition au pouvoir, ce qui permet d’obtenir davantage de soutiens que les manifestations antipass précédentes. Signe que le rebranding est efficace !
Crédit photo : Shutterstock
Saper Vedere