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Analyse du fiasco de Fleury Michon et de son #PouletQuiTweete

Fleury Michon a eu l’idée de l’été : faire tweeter un filet de poulet durant deux semaines. Cette idée complètement débile, vraisemblablement survenue au cours d’un brainstorming trop arrosé n’a pas manqué de faire réagir la communauté Vegan et quelques communicants/commentateurs. Cela n’a pourtant rien d’un bad buzz. Analyse.
II. Analyse
1. Propagation
Il y a eu 1125 tweets par 582 personnes. Cela explique déjà que nous avons affaire à une tempête dans un verre d’eau, car ce volume est en tout point ridicule. A titre de comparaison, le bad buzz Numericable disposait de 1800 tweets et celui de Cera Interactive 3000. De plus, aucun média n’en a fait l’écho ce qui réduit le champ de visibilité à la seule twittophère. Tout commence avec Klaire Fait Grr qui nous explique le pourquoi de sa réaction :
Très rapidement, les images négatives vont alors fuser et sont résumées par ce tweet :
Une belle réussite ce #PouletQuiTweete par @FleuryMichon. Chapeau! https://t.co/0pIWlXOql9 pic.twitter.com/PQIsYyRc6S
— Brice Mazenod (@BriKo) July 28, 2015
Klaire créera également un compte parodique :
Passons désormais en vue « social network analysis ». Pour rappel, je me sers de la typologie des conversations sur Twitter :
On remarque que cela passe d’un seul individu : Fleury Michon, qui se fait attaquer via les positions de Klaire avant que la situation n’évolue vers une foule étroite. Comme cette foule est étroite, c’est un micro écosystème qui réagit à la situation et cette foule étroite n’évolue jamais pour plus.
Cela est confirmé par la cartographie finale :
On voit clairement la situation à savoir des communautés Vegan qui attaquent Fleury Michon. En arrière Klaire et son compte Poulet qui tweete rejoignent sa communauté bleue claire. Sur les extérieures, des personnes provenants de communicants social media ou publicité. On a donc clairement un micro-environnement de gens qui critiquent la publicité, ou qui critiquent la publicité de la viande.
2. Analyse des intervenants
Ce constat, il est confirmé par la cartographie des relations following-followers entre les différents intervenants de ce « bad buzz ».
Cela se confirme parfaitement. Klaire fait le pont entre les communautés de communicants et la communauté Vegan. On a donc une situation de consanguinité où les clients ne seront certainement pas concernés.
Un simple wordcloud des profils nous le confirme :
III. Conclusion
Un nouveau cas de bad buzz en toute consanguinité
On le voit une nouvelle fois, et cette fois, il n’y a pas meilleure preuve : seule la communauté communication et la communauté Vegan sont concernés. A ce que je sache, il y a peu de risque que Fleury Michon perde le moindre chiffre d’affaires en ayant fâché les végétariens. Par contre, la campagne est nulle et tout le temps passé sur ce fiasco est une perte d’argent pour la marque.
Des communautés bien structurées
Par contre, il est intéressant de remarquer que les communautés sont très structurées et peuvent réagir très rapidement à un mauvais cas d’entreprise. L’influence de Klaire sur ce coup a été prépondérante.
Faire preuve d’empathie
Le grand problème est qu’il n’y a aucune prise d’empathie ou de classification en domaine sensible. Il n’est jamais venu à l’idée que l’action de communication de faire parler un poulet qu’on abat pourrait poser problème. Je pense profondément que nos métiers de communicant demandent que l’on soit à l’écoute des gens et ouverts à tout ce qu’ils pourraient penser de nos communications. Sur Twitter et les réseaux sociaux, il y a 4 sujets sensibles : les communautés vegan, les communautés féministes, les communautés LGTB et les communautés écolos. Il n’est pas difficile de s’imaginer à la place de celles-ci pour n’importe quelle de nos publicités.
La préparation avant tout
Un autre des soucis est le manque flagrant de préparation de la campagne. J’ai déjà parlé ici et ici du fait que toute campagne peut être détournée et qu’il s’agit d’un véritable risque pour n’importe quelle marque. Dès lors, comme le soulève Vincent Pittard :
@Nico_VanderB surtout sans réserver comptes sociaux et noms de domaine. @Klaire devient éleveuse de @PouletQuiTweete pic.twitter.com/dOTrWt1J7h
— Vincent Pittard (@vincent_pittard) July 28, 2015
Il est incompréhensible qu’il n’y ait pas la moindre prévoyance du « hijacking », véritable tendance du moment. L’histoire de la non-réservation était d’ailleurs arrivée à Numericable où dans une de ses publicités une URL www.jeveuxuneboué.fr était affichée pendant 1 et 1 seule seconde :
Un internaute a dès lors réservé le nom de domaine pour montrer son mécontentement général :
Cela nous montre bien que de plus en plus, l’histoire se répète, il est donc nécessaire de tenir compte des cas historiques et de se montrer ouvert à tous tout en préparant au mieux ses campagnes de communication, sous peine de recevoir le retour de flamme. Parce que même si ce bad buzz n’est que microscopique, il n’en est pas moins une sacrée erreur de communication.
merci pour cette analyse, c’est instructif,
Ca me fait dire que le cas de Aoste avec sa pub ouvertement antivégétarienne recyclée d’une marque de la même multinationale (faille scénaristique en or, la mère végétarienne qui choisit LE jambon) doit tourner a la même chose.
Ca repasse en ce moment avec le #Aoste . si jamais ca ressemble plus a quelque chose.
bonjour
quel outil de carto utilisez vous? bien à vous
Bonjour,
Cela s’appelle Gephi et c’est Open Source.
Un autre volet intéressant de cette affaire, c’est l’angle e-RP : Fleury Michon venait à peine de monter une grosse opé blogueurs, en emmenant des influenceurs Market / Pub / Social Media en voyage en Alaska.
Quelques jours après leur retour sort cette bouse de #PouletQuiTweete. Pas un des invités de la marque à ce voyage n’a pris leur défense…
On nous aurait pourtant averti si les grosses opérations blogueurs n’avaient aucun effet, non ? ( http://www.reputatiolab.com/2014/06/plongee-les-egouts-linfluence/ )
Haha, je me souviens de ce très bon article 🙂
Bon après certaines, de temps en temps, peuvent avoir un vrai effet. Mais c’est de moins en moins le cas visiblement.
Donc la logique de l’article : seuls les vegans sont concernés par le traitement des poulets ?
Trolling like a boss